Après la démission de l’ancien curé de la cathédrale de Fribourg pour abus sexuel sur mineur, son remplaçant pressenti est à son tour écarté. L’Illustré dévoilait sa double vie la semaine dernière. Le diocèse serait-il plus clément envers les prêtres qu’envers ses employés laïcs ?
L’abbé C., dont la nomination comme curé de la cathédrale de Fribourg était imminente, n’occupera pas ce poste. Suite aux révélations de son activité sur un site de rencontre gay dans L’Illustré du 15 juillet, Mgr Charles Morerod a décidé d’annuler sa nomination. Il met en avant, plus que l’orientation sexuelle du prêtre, « le respect de l’engagement au célibat pris lors de son ordination ». Un premier candidat à cette succession, dont le nom circulait depuis des semaines, avait été recalé suite à une accusation d’abus sexuel.
L’abbé C. a reconnu les faits dans un courrier adressé à l’hebdomadaire romand. « Ma présence sur ce site et les rencontres qui en ont découlé ne sont pas compatibles avec mon engagement. Je me suis perdu », a‑t-il confié. Il dit avoir voulu arrêter et avoir consulté un psychothérapeute, mais sans trouver de réponses.
Nombreuses entorses
Comment en est-on arrivé là ? « Pourquoi trouver un prêtre sans tache à nommer à un poste important est-il devenu si compliqué ? », se demandent de très nombreux paroissiens entre Fribourg, Genève, Lausanne et Neuchâtel. Le défi est de taille, car plus d’une centaine d’ecclésiastiques s’affranchiraient des règles de la morale sexuelle de l’Eglise, estiment des sources proches de l’évêché.
Comment Mgr Morerod explique-il que des prêtres, sévères avec les paroissiens divorcés, se mettent en marge des règles de leur Eglise ? « Cela cache souvent une difficulté avec leur propre sexualité, mais ce n’est pas forcément un double discours ; plutôt une tentative désespérée de reporter sur autrui la morale stricte qu’eux-mêmes n’ont pas su respecter », confie prudemment l’évêque.
Ces déviances morales sont-elles donc tolérées ? « Pour les abus sur mineurs, j’ai communiqué des soupçons à la police à treize reprises, répond Charles Morerod. Et l’abbé Frochaux, qui s’est mis en retraite, attend un jugement de Rome. Quant aux prêtres aux pratiques hétéro ou homosexuelles, je les invite à retrouver la fidélité à leurs engagements. Et s’ils ne le peuvent pas, après un temps de discernement, ils doivent choisir comment continuer leur vie chrétienne. »
Deux poids, deux mesures
L’occasion donnée aux prêtres fautifs de s’amender n’est que rarement offerte aux salariés laïcs de l’Eglise en Suisse. Ces derniers mois, plusieurs collaborateurs romands de l’Eglise catholique ont été renvoyés sans véritable dialogue alors qu’ils n’avaient pas commis de faute professionnelle grave.
Ne s’agit-il pas d’une différence de traitement ? « Si je veux renvoyer un prêtre, la procédure est extrêmement difficile, car le droit de l’Eglise insiste très lourdement sur le fait qu’on est ordonné une fois pour toutes, répond Mgr Morerod. Il y a, en effet, deux manières de gérer le personnel… » Une différence qui saute aux yeux à mesure que s’accumulent les scandales sexuels dans le clergé romand.