L’invité – Jean-Brice Willemin, porte-parole de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud, met le doigt sur une nouvelle donne, depuis l’irruption violente de la religion dans l’actualité.
Le traitement de l’actualité religieuse dans les médias européens agace souvent les croyants, étonnés par l’analphabétisme de nombreux journalistes dans ce domaine. Clichés, termes imprécis, méconnaissance des grands courants qui animent la vie des Eglises enlèvent souvent du crédit aux articles de journaux ou informations télévisées traitant de religion.
Pourtant, nos sociétés ont un besoin urgent d’informations et de mises en perspective depuis l’irruption violente de la religion, en 2015, dans nos espaces de vie. Les attaques terroristes de djihadistes à Paris et Bruxelles ont contraint les médias à s’interroger sur les dérives sectaires d’extrémistes suicidaires d’origine musulmane.
Par ricochet, des laïcistes intransigeants voulant cantonner l’expression religieuse à une sphère strictement privée s’en sont pris à des symboles de notre identité judéo-chrétienne. La croix autour du cou, la crèche et même le sapin de Noël sont devenus des objets de polémique. N’a‑t-on pas proposé, dans des milieux politiques et académiques de France et Suisse romande, de les proscrire afin de garantir une pseudo-neutralité religieuse ? Les médias laïcs ont été plutôt empruntés pour rappeler que l’expression d’une dimension spirituelle est garantie sur la place publique.
En France, deux écoles renommées de journalisme, à Lille et à Toulouse, tentent de mieux former leurs étudiants dans ce domaine. Ces derniers reçoivent un enseignement de culture religieuse et ils rencontrent des clercs, imams ou théologiens sur leurs lieux de prière.
Pour aller plus loin, l’Association française des journalistes d’information sur les religions (Ajir) a créé le Prix Religions / Jeunes journalistes. Son président, l’éditorialiste et écrivain Franz-Olivier Giesbert, a récompensé cette année un étudiant de Lille. Il a réalisé un reportage sur la vie d’une communauté chrétienne érythréenne autour d’une église de fortune construite dans la jungle de Calais, avant son démantèlement en 2016.
Et en Suisse romande ? La directrice de l’académie de journalisme à Neuchâtel est consciente des insuffisances de la formation des journalistes pour traiter des faits religieux. Elle envisage l’organisation de journées thématiques.
A Lausanne, le directeur du Centre de formation au journalisme et aux médias (CFJM) assure aux stagiaires romands une formation de base d’une dizaine de semaines réparties sur deux ans, mais sans traiter de thématiques spécialisées comme le sport, les sciences, la culture ou la religion. Néanmoins, le parcours 2017 – 18 prévoit un après-midi sur le fait religieux avec un débat sur la pertinence ou non de les former sur ce point. Et le CFJM envisage un module sur les croyances dans ses offres de formation continue. Une prise de conscience est en train de naître.