Les apprentis suivent quelques semaines de cours pratiques en parallèle de leur formation théorique et scolaire. Tour d’horizon dans cinq secteurs professionnels.
On les appelait cours pratiques, ces jours d’enseignement qu’on intitule aujourd’hui cours interentreprises (CI). Distincts des enseignements scolaires, ils sont administrés par les associations professionnelles de 200 métiers. Pour les apprentis, c’est une occasion de mieux maîtriser les techniques en vogue avec des professionnels du terrain.
18’000 apprenti·e·s
Les CI sont supervisés par la direction générale de l’Enseignement post obligatoire (DGEP). Sur le plan vaudois, ce sont plus de 18’000 apprentis dont la DGEP surveille la formation ainsi que la délivrance du Certificat fédéral de capacité (CFC) ou de l’Attestation fédération de formation professionnelle (AFP). « L’autorité cantonale participe encore à la coordination de la formation entre les trois lieux de l’apprentissage que sont l’entreprise, l’école et les CI, un système trial plutôt que dual », comme le précise le directeur Lionel Eperon de la DGEP.
A l’avenir les CI seront encore mieux adaptés à l’évolution des métiers, prévoient la DGEP et ses partenaires professionnels. Ils parlent de qualité, développement durable, communication, digitalisation… Ce qui pourrait contribuer à entraîner une augmentation du nombre de jours de ces cours pratiques dès la première année de formation.
Sur le plan financier, la DGEP contrôle la participation des apprentis aux CI ainsi que les décomptes présentés par les prestataires professionnels. Ces mesures permettent de calculer les subventions qui leur sont accordées par le fonds cantonal vaudois en faveur de la formation professionnelle (Fonpro).
Commerce
Les 21 branches du CFC d’employés de commerce regroupent environ 5000 apprentis dans le Canton, se répartissant dans des secteurs aussi variés que les administrations, banques et services financiers, assurances, immobilier, commerces et divers secteurs industriels et techniques. Les cours interentreprises, de 7 à 40 jours répartis sur les trois années de formation, permettent d’acquérir des compétences affinées sur le terrain.
Comme l’explique Antoine Chappuis, de la Communauté d’intérêts pour la formation commerciale de base (CIFC), les apprentis sont amenés à se confronter à des cas concrets et variés. Ce sont par exemple les relations avec les clients, à travers des jeux de rôle en situation concrète. Il s’agit aussi de maîtriser les techniques d’archivage de documents comptables des clients. Et des formateurs viennent encore montrer comment gérer les ressources de l’entreprise de façon écologique, au niveau du bâtiment (éclairage, chauffage, ventilation) et du matériel de bureau (ordinateurs, recyclage du papier).
« Ces cours pratiques ont tendance à être considérés, à tort, avec légèreté par les apprentis, car les appréciations et notes des enseignants comptent peu pour l’obtention du CFC », regrette Antoine Chappuis. « C’est dommage car ces nouveaux enseignements sont en phase avec l’évolution de nos métiers. Nous envisageons ainsi de les développer pour apporter à nos apprentis de nouvelles compétences informatiques, sociales et comportementales. »
Soins, santé
Les 1355 apprentis du domaine des soins, de la santé et du social sont répartis dans trois filières de formation : aide en soins et accompagnement (ASA) pour une AFP en deux ans, assistant/e en soins et santé communautaire (ASSC) pour un CFC en trois ans et assistant/e socio-éducatif/ve (ASE) pour un CFC en trois ans. Des CI spécifiques sont organisés pour chacun des trois secteurs, et varient de 20 à 34 jours sur la totalité de la formation.
Des professionnels de la santé et du social donnent ces cours pratiques. Ils sont spécifiques selon les métiers. Ce sont par exemple des mises en situation pour aider la personne à s’habiller et à lui donner des soins corporels. « C’est aussi le lieu pour aider nos apprentis à se projeter dans leur métier, à développer des comportements adéquats dans leur champ d’action, à analyser des difficultés rencontrées sur leur lieu de travail », confie Nicole Taverney, coordinatrice-conseillère pédagogique des CI pour ces trois métiers. « Nous visons à développer des compétences dans un esprit de collaboration interdisciplinaire et à construire des ponts entre la théorie et la pratique. »
Ces cours, obligatoires, ne sont toutefois pas sanctionnés par une note spécifique. « Il y a moins de pression. Cela stimule chaque apprenti à développer les bonnes attitudes de comportement vis-à-vis des patients, de leur entourage et aussi envers les collègues et supérieurs. »
Bâtiment
Près de 2400 apprentis du bâtiment et de la construction passent par les cours inter-entreprises, 2200 pour obtenir un CFC en trois ou quatre ans selon le métier choisi et plus de 200 pour une AFP en deux ans. Ces formations plus ou moins longues s’expliquent par une diversité des métiers, dont certains font autant appel à de l’adresse manuelle qu’intellectuelle. « Et souvent, l’entreprise formatrice, spécialisée dans un domaine, ne peut offrir une formation complète avec toutes les facettes du métier de l’apprenti », confie Jean-François Savary, directeur de l’Ecole de la construction à Tolochenaz. « Cela a toujours rendu les CI indispensables pour donner aux jeunes un large éventail de compétences. »
Ces cours ont lieu en moyenne trois semaines par an, les maçons en ayant même six et les parqueteurs seulement deux. La tendance va vers une augmentation de ces cours pratiques, vu l’évolution technique des métiers de la construction. « Et les CFC sont de plus en plus programmés sur quatre ans. C’est le cas des charpentiers et des vitriers, qui doivent acquérir des connaissances pointues en informatique pour les réalisations novatrices d’architectes créatifs », explique le directeur de l’Ecole. L’un de ses maîtres-charpentiers nous le confirme : « Les nouveaux bâtiments utilisent mieux le bois, un matériau original qui exige de l’imagination conceptuelle, de savoir aussi dessiner à main levée et discuter de l’exécution avec l’architecte. »
Ces nouvelles exigences des métiers du bâtiment rendent les CI indispensables. Les employeurs en sont conscients et apprécient de recevoir chaque année des appréciations « formatives » sur leurs apprentis.
Mécanique automobile
Les patrons des garages automobiles envoient leurs 900 apprentis aux cours interentreprises du Centre vaudois de l’Union professionnelle suisse de l’automobile (UPSA) à Yverdon. Le mécanicien en maintenance d’automobiles est formé sur trois ans alors que le « mécatronicien », plus axé sur les systèmes électroniques des voitures, a besoin de quatre ans et l’assistant en maintenance d’automobiles de deux ans.
« Les CI leur sont indispensables. Les grands centres d’entretien automobile leur confient des tâches spécifiques, différentes selon les marques, alors que les petits garages forment des apprentis généralistes », confie Philippe Monnard, responsable de la formation professionnelle de l’UPSA. » Tous suivent trois à quatre semaines de CI par an dans le centre de formation du Nord vaudois. Chacun de ses sept ateliers peut accueillir une douzaine d’apprentis qui perfectionnent les travaux et gestes de base de la mécanique automobile. Leurs performances sont notées et intégrées pour 10% dans les résultats d’examen au CFC.
Ces cours pratiques sont-ils aussi appelés à se développer ? « La durée des cours ne va pas changer pour l’instant. En revanche, leur contenu est constamment adapté à l’évolution rapide des technologies automobiles.
Restauration
Pour les cours inter-entreprises, les 750 apprentis du secteur de la restauration peuvent compter sur Hotel & Gastro formation Vaud, association de formation des hôteliers-restaurateurs-employés (HGF-VD) à Pully. Ses deux cuisines et sa salle de restaurant accueillent les apprentis de cuisine et du service : quatre semaines réparties sur les deux ans de formation AFP ; cinq semaines pendant les trois ans du CFC des apprentis cuisiniers et spécialistes en restauration.
« Nous faisons travailler cuisiniers et collaborateurs du service main dans la main. Ils se confrontent ainsi à deux environnements professionnels très différents, favorables à la compréhension du métier du confrère », se félicite Eric Dubuis, le directeur de l’association de formation. « C’est l’essence de cette formation pratique, qui insiste sur le respect entre collègues aux métiers indissociables les uns des autres. Et nos apprentis apprécient. » Leur enthousiasme dans les cuisines de l’école est bien récompensé. Les notes obtenues dans ces travaux pratiques sont déterminantes pour avoir une AFP ou un CFC.