Le vieux grenier de céréales a été artistiquement transformé en lieu d’exposition et de rencontre par le Dr Bernard Mivelaz. Homme de culture engagé dans la médecine humanitaire, le Valaisan y met en valeur des peintres contemporains. Leurs œuvres peuvent être acquises au bénéfice d’un centre hospitalier africain que le médecin a développé en partenariat avec le Dr Zala, pédiatre burkinabé.
La rénovation de ce raccard construit au 18ème siècle à Trient au pied du col de La Forclaz, à quelques kilomètres de la frontière française, a débuté en 2015. Soutenu par des artisans sensibles à sauvegarder ce patrimoine hérité de compagnons savoyards, le Dr Mivelaz, 73 ans, et son épouse ont mis en valeur ce bâtiment à l’intérieur duquel se trouve un raccard qui a la particularité d’être entièrement en mélèze, entouré de quatre galeries.
Pilets en forme de champignons
Dès l’entrée, on découvre un sanctuaire artistique. Le salon-salle à manger fait déjà office de salle d’expo. On grimpe l’escalier et l’on découvre un magnifique double plafond. Il s’appuie sur des piliers, surnommés pilets, surmontés de grandes pierres rondes et plates appelées palets. Une œuvre d’art en soi à découvrir avant de passer par les petites salles d’exposition du premier étage de La Grange des Miv, comme l’ont baptisée les propriétaires.
Les parois en mélèze constituées de poutres exceptionnellement longues s’emboitent sans clous ni visserie. Elles surprennent agréablement par leurs couleurs brun-oranger. « Les madriers ont été préservés du soleil grâce aux galeries périphériques qui entouraient le raccard. C’est là qu’y étaient entreposées les récoltes de seigle », explique le Dr Mivelaz. Une rénovation qui offre d’excellentes conditions pour mettre en valeur les 70 à 80 objets ou tableaux exposés.
Comment le médecin humanitaire s’y est-il pris pour relever ce défi artistique ? « J’ai commencé à y penser il y a une quinzaine d’années. En 2010, j’ai établi des plans et procédé à la mise à l’enquête. Ma sensibilité artistique pour conserver le patrimoine bâti et le soutien d’amis architectes m’ont permis d’arriver au but. » Et pour exécuter les travaux ? « J’ai acquis une certaine habileté manuelle en ayant déjà rénové une ancienne maison en Valais. »
Le couple a travaillé d’arrache-pied à raison de 10 – 12 heures quotidiennement pendant huit ans durant les cinq mois de la belle saison. Le raccard affaissé sur un côté a d’abord été « réhorizontalisé », rehaussé de 32 à 44 cm. « Nous nous sommes tout de même épargné le travail de maçonnerie et la rénovation du toit. »
Un écrin de soins
Ce magnifique écrin sert une noble cause, celle qu’anime le Dr Mivelaz depuis plus de vingt ans. « Médecin généraliste à Renens, j’ai fermé mon cabinet à 50 ans pour voyager dans le monde et pratiquer de la médecine humanitaire. » Faisant l’évaluation d’un projet de dispensaire au Mali, le médecin valaisan est rentré par le Burkina Faso. « À Ouahigouya, ville du nord du pays, à 40 km de la frontière malienne, j’y ai rencontré le Dr Lassara Zala qui m’a demandé de venir le remplacer temporairement dans son dispensaire ouvert depuis une année. »
Avec son ami médecin burkinabé, Bernard Mivelaz a établi une collaboration pour les soins et un partenariat pour le développement du dispensaire. Il a vite enchaîné en participant à la construction d’un bloc opératoire conçut par le chirurgien orthopédiste genevois Philippe Bédat puis en réalisant une radiologie, un cabinet dentaire, une maternité et un service de néonatalogie. « Aujourd’hui, notre centre hospitalier de 200 soignants accomplit 50’000 consultations/an, gratuites pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes ».
Au cours de ces quinze dernières années, Persis Valais, l’association de soutien, a consenti à de grands investissements dans le Centre médico-chirurgical pédiatrique Persis pour améliorer les soins, la prévention et la formation. « Il nous est aujourd’hui difficile d’aller sur place. A partir de 2018, les réseaux terroristes djihadistes sont parvenus depuis le Mali à s’infiltrer jusqu’à Ouahigouya. La sécurité s’est dégradée et c’est devenu dangereux pour des Européens. » Auparavant, le médecin suisse travaillait plusieurs mois par an à l’hôpital. Aujourd’hui, le Dr Mivelaz poursuit son aide essentiellement depuis la Suisse en attendant de pouvoir retourner dans son pays d’adoption. Et La Grande de Trient est un outil utile pour lever des fonds. L’art mis au service d’une noble entreprise philanthropique au Burkina Faso.
Expo Zanger
Le peintre bâlois Zoomby (Jean-Pierre) Zangger expose depuis le début de l’été à La Grange de Trient. Cet artiste né en 1946 (décédé en 2016) est un « sage » révolutionnaire de la génération 68. Zangger fait partie de l’époque du pop art américain des années1970 et ses œuvres abstraites sont exigeantes pour le pubic. Les arbres, les feuillages, l’herbe, les sous-bois sont ses actuels thèmes de recherche.